La Maison du peuple - Clichy

Lauréat d'Inventons la Métropole du Grand Paris.

Le Grand Paris a une poussée d’archi – Libération

Maison du Peuple

Clichy, Pantin, Pleyel… Les acteurs de l’immobilier ont dévoilé mercredi les 54 sites dans lesquels ils souhaitent investir à hauteur de 7,2 milliards d’euros dans les années à venir.

« Le plus grand concours d’aménagement, d’urbanisme et d’architecture d’Europe » : telle est la façon dont le communiqué officiel présente l’appel à idées «Inventons la métropole du Grand Paris», dont les lauréats ont été annoncés mercredi. Ce que ce texte ne dit pas, c’est qu’il s’agit aussi d’une des plus importantes promesses de retombées financières, d’une ampleur assez inédite elle aussi. Sur 54 sites du Grand Paris, les acteurs de l’immobilier se proposent d’investir un total de 7,2 milliards d’euros.

Inaugurée avec la consultation «Réinventer Paris» lancée en 2016 par la municipalité, cette nouvelle forme de concours met en compétition des propositions architecturales et urbaines certes, mais aussi financières. Un investisseur, plus ou moins gros, est toujours dans l’équipe dont il est le plus souvent le mandataire. De sorte que les candidats disent en gros aux maires : voilà ce que je vais construire ici et voilà la somme que je vous propose pour acheter le site et y mener mes opérations. On simplifie.

Inventons la métropole est une sorte de joint-venture entre l’Etat, la Société du Grand Paris (qui construit le futur métro Grand Paris Express) et la métropole du Grand Paris. Présidée par Patrick Ollier, maire LR de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), la structure métropolitaine a un an et demi d’ancienneté, ce qui ne fait pas lourd pour résister aux critiques de ceux qui voudraient la voir disparaître. « Quand j’ai lancé le concours, je ne savais pas trop ce que j’allais faire », raconte Patrick Ollier. Mais comme Manuel Valls avait annoncé une grande consultation autour de 19 des futures gares du Grand Paris Express et que l’Etat voulait faire la même chose sur 10 sites clés de la métropole, les trois opérations ont fusionné. Dans ce type de consultation, ce sont les villes qui proposent des sites : 112 ont été visités, 57 sélectionnés. «Les bons esprits m’ont prédit que nous n’aurions pas plus de 40 dossiers de réponse. On en a eu 420», raille Ollier.

« Bijou mécanique »

Que va-t-on voir dans le Grand Paris ? Toutes les tendances dont il est question dans l’aménagement d’aujourd’hui. Du végétal à haute dose, avec sa déclinaison «agriculture urbaine»; de la réversibilité, avec des logements évolutifs au fil de la vie ou des façades qui se transforment à coups de rajouts, du bois de construction, de l’économie circulaire avec des matériaux recyclés, des projets éphémères pour la durée des chantiers et de la concertation, coconstruction et participation sous toutes les formes.

Evidemment, on ne peut pas décrire ici les 54 propositions lauréates mais certaines valent un petit coup de projecteur. Parmi les plus emblématiques figure le projet de Rudy Ricciotti autour de la Maison du Peuple de Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine). Classé monument historique (1935), avec une structure métallique de Jean Prouvé, un « bijou mécanique », dit la fiche technique. La tour que l’architecte s’apprête à poser à côté se devait d’être à la hauteur du défi technique. Qu’on en juge : « De béton fibré et de verre, une tour vient se poser en équilibre à côté de la Maison du Peuple , résultat d’une prouesse constructive imaginée par Lamoureux & Ricciotti Ingénierie, puisque son exosquelette portant l’ensemble du bâtiment sera coulé sur place dans un gigantesque sarcophage. » Rien de moins pour cet édifice de 96 mètres de hauteur qui « dialoguera telle une sentinelle avec la cité judiciaire des Batignolles ».

A Pleyel, où il faut franchir l’immense faisceau ferroviaire Nord-Europe, la réponse, elle aussi, est monumentale, avec 176 000 mètres carrés construits par le cabinet norvégien Snohetta, des tours, de la hauteur pour un projet qui « entend faire de Pleyel à la fois une porte d’entrée du Grand Paris et un symbole architectural fort, véritable signal urbain à l’échelle de la métropole ». Avec cinq lignes de métro et deux de RER en correspondance à cet endroit, la «porte» ne pouvait pas ressembler à un trou de souris.

Autre prouesse technique, la construction en bois qui reliera Paris et Vanves en chevauchant le boulevard périphérique à la porte Brancion. Les architectes Hardel et Le Bihan y ont prévu un foyer pour jeunes travailleurs et une résidence étudiante. Ils ont « l’ambition de nouer un dialogue entre les deux communes en franchissant le boulevard périphérique ».

Mais plus que les prouesses d’ingénierie, ce qui frappe parfois dans cette consultation, ce sont les programmes, ce que les constructeurs veulent mettre à l’intérieur de leurs bâtiments. Certes, on retrouve ici et là les grands classiques du moment, comme à Paris-Zac Paul Bourget, avec des«espaces tertiaires innovants (fablab, espace coworking, pépinières d’entreprises et start-up, repair-café, living lab à destination des habitants)». Mais il arrive quand même que le projet comporte un rien de mystère. Ainsi à Pierrefitte-Stains-Tartres Nord, les architectes de l’Atelier WOA entendent mener « la construction de bureaux, d’un composteur industriel et l’aménagement d’un parc arboré. La seconde phase permettra la création d’un parc à vocation agricole, pédagogique et récréative. Quant à la dernière phase, les projets de développement restent ouverts : elle pourra évoluer selon le contexte réglementaire, économique, technique et social ».

Vitrages

Dans le genre inattendu, à Bagnolet (Seine-Saint-Denis), au lieu-dit Marché à la Ferraille, une proposition surprenante (surtout vu le nom de l’endroit). Il y aura à cet emplacement « un lieu dédié à la haute couture, avec un incubateur de la mode textile et un atelier FashionTech, comprenant une médiathèque textile et un showroom ». Plus étrange encore, le bâtiment de Maud Caubet comportera « trois façades communicantes innovantes et programmées avec les habitants ». Or, sur l’image qu’on voit dans la fiche, se dessine une figure au milieu des vitrages, et on se demande si ce sera, par exemple, le portrait des habitants que l’on verra là.

Même si la consultation est aussi une affaire de business, les architectes gardent le droit d’être bienveillants. A Villejuif (Val-de-Marne), sur les terrains Bizet, dans un ensemble de 180 logements, Nicolas Michelin a prévu « une pièce en plus, le Cocon, qui permet d’aménager son appartement librement ». A Pantin (Seine-Saint-Denis), sur l’ancien terrain de l’Association sportive de la police de Paris, le projet « Pinocchio » du studio Muoto comprendra « une école Montessori proposant une pédagogie alternative, une crèche thérapeutique prévue pour recevoir des enfants handicapés et un fablab ». Comme quoi, il n’y a pas que l’argent dans la vie.

Par Sibylle Vincendon. Le 19 octobre 2017.

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